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24 octobre 2008 5 24 /10 /octobre /2008 10:05

Lors d’un voyage aller-retour à Pauillac fait dans la semaine, je me disais en conduisant que cela faisait bien longtemps que je n’avais pas abordé un sujet polémique dans ce blog.

Et là, miraculeusement, un sujet s’est imposé à moi en regardant les vignobles médocains traversés.

Dans de nombreux Grands Crus, c’est la période de la pré-taille. C’est une mode qui s’est développée depuis quelques années. Cela consiste à supprimer toute la portion du feuillage qui se trouve au dessus du dernier fil de fer dans le but de rendre les travaux manuels plus rapides et moins pénibles.

Personnellement, je ne pratique pas cette pré-taille mais je comprends que dans les vignobles « peu valorisés », il soit opportun de diminuer les charges avec une pré-taille, l’hiver, ce qui est un moindre mal pour la vigne

Mais là je ne comprends pas car il s’agit de Grands Crus qui représentent toujours l’élite de la viticulture mondiale et dont les prix de vente ne nécessitent pas vraiment d’aller grappiller les quelques centimes de prix de revient sur le dos de la vigne.

Il y a une semaine, les pieds de vigne portaient encore leurs raisins. Maintenant, on les scalpe brutalement.

Comment peut-on s’être éloigné à ce point de sa vigne au point de penser que lorsque les derniers raisins ont été récoltés, la vigne n’a plus d’intérêt jusqu’à la prochaine saison culturale ?

Que fait-on de la sève qui est encore présente dans les rameaux et les feuilles ?

On a oublié que le cep de vigne est vivant 365 jours par an.

Une fois la récolte amenée à maturité, la vigne doit un peu « penser à elle » et s’occuper d’elle-même. Pour cela, elle dispose de quelques semaines avant les gelées. Le feuillage doit « murir », c'est-à-dire que les feuilles doivent lentement aller vers la mort en changeant de couleur.

La sève doit regagner les racines. Il y a l’hiver à préparer mais aussi la prochaine saison qui se profile.

Comment peut-on aussi se dire préoccupé par les maladies du bois quand au même moment, on passe au hachoir une vigne en pleine végétation?

Peut-être qu’un jour, lorsque le dernier enfant aura quitté le domicile familial, on se mettra à amputer les parents à la serpe (et sans anesthésie ni antiseptique) sous prétexte qu’ils n’ont plus d’utilité.

Cela paraît irréel et pourtant, c’est ce que de nombreux vignobles grands vignobles subissent au nom de la productivité.

 

Où est passée la passion ?

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commentaires

E
Une autre question qui me vient souvent à l'esprit, est, pourquoi tous ces grands crus (l'élite de la viticulture mondiale) ne sont ils pas tous en bio? (même non certifié). Bravo pour le style, l'énergie, la fraicheur et la sensibilité.<br /> <br /> Eric Monné
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M
Peut-être une autre explication: A partir de Descartes l'Homme s'est retrouvé seul, sans autre que lui sur terre. La nature, au dessous de lui, devait lui être inféodé et produire, grâce à la rationnalité, pour lui permettre de croitre et d'assouvir sa domination afin d'accéder au confort corporel et à l'oubli de la réalité que produit la capture de l'imaginaire humain par les médias. Le projet n'était pas chez Descartes bien sûr... le sien était de faire émerger l'humanisme. Mais il a produit cet effet étrange... l'Homme vivant dans des cités, ne sait pratiquement plus qu'il vit sur Terre. Une révolution doit donc s'accomplir... l'humanité doit réaliser qu'elle vit au sein d'une nature, dont elle dépend et qui dépend d'elle! Le progrès de l'Homme ne peut s'accomplir contre une nature dont il est une des parties. Comment faire cette révolution, alors que tous nos intellectuels sans exception vivent en ville et se foutent pas mal de notre fragile Terre? Les discours sur le social, l'économie, l'humanitaire les rendent bien plus médiatiques que les quelques fous comme Bové qui coupant des maïs transgéniques (la pointe du progrès) ne sont source que de railleries et de condescendance... pauvres paysans. Comment voulez vous que les gens qui sont propriétaires de ces grands domaines bordelais, se rendent compte de soins que l'on doit apporter à une plante. Elle n'est pas un Etre vivant car seul l'Homme l'est. Elle n'est q'un facteur de production... au demeurant prestigieux et agréable à boire.
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T
Bjr, un morceau de réponse peut-être là :<br /> Dans les groupes financiers ou "d'investissements", qui ont en effet la passion mais celle du profit, et un peu du produit dans le fait de boire le cru le plus chère et médiatisé ; où seul la note et le prix prévôts. <br /> <br /> antoon
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T
Bjr, un morceau de réponse peut-être là :<br /> Dans les groupes financiers ou "d'investissements", qui ont en effet la passion mais celle du profit, et un peu du produit dans le fait de boire le cru le plus chère et médiatisé ; où seul la note et le prix prévôts. <br /> antoon
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le blog de Corinne Comme

En créant ce blog,  je souhaite faire partager une certaine approche de notre métier de vigneron afin de réhabiliter le mot « paysan ». Au-delà de son rôle dans la production de denrées alimentaires, il doit aussi être le gardien d’un savoir ancestral et faire le lien entre la nature, les animaux et l’humanité. Il est l’observateur et le garant des grands équilibres de la vie. C’est une tache prenante et passionnante qui s’accompagne de joies, de peines et de moments de doutes.

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