Récemment alors que je travaillais dans le cuvier, j’ai eu besoin d’une tige pour m’aider à récupérer un outil tombé entre deux petites cuves.
En cherchant l’objet de mes rêves dans le placard, j’ai retrouvé l’agitateur qui nous servait dans le passé pour remettre les lies en suspension dans les barriques de vin blanc.
Il n’est plus utilisé depuis de nombreuses années et pour être totalement sincère, j’avais même presque oublié qu’il existait.
Il m’a rappelé l’époque de nos débuts, où nous réalisions ce travail, jusqu’à trois fois par semaine, « pour donner du gras au vin ».
Ainsi, on pensait naïvement pouvoir se comparer aux références bordelaises dans ce registre et prétendre alors à une gloire aussi rapide qu’universelle !
Puis, le temps a passé. La gloire facile telle que nous la rêvions n’a jamais vraiment été au rendez-vous et des doutes sont nés sur la pertinence d’une telle démarche, surtout quand on souhaitait remettre par la biodynamie le terroir et son expression au centre de notre démarche.
L’ « outil-brasseur » a progressivement perdu de son rôle de bras armé de la reconnaissance éternelle. Puis les barriques ont disparu elles-aussi.
On est revenu aux fondamentaux : du raisin pressé, fermenté avec les levures venues de la vigne (ou venues d’où elles veulent) et c’est tout.
C’est tout et c’est l’essentiel.
Dans cette phase d’adolescence viti-vinicole que nous avons connue, cette technique d’élevage sur lies et quelques autres étaient des négations du terroir et du cépage. Mais elles nous ont permis
de construire notre identité.
En voulant copier les autres, nous faisions comme l’adolescent qui s’identifie à son chanteur favori ou à son joueur de foot fétiche. Nous n’étions pas nous-mêmes.
De ce fait, nos vins n’avaient pas eux non plus leur propre identité. Cela se ressentait mais nous ne pouvions le voir.
Maintenant, peut-être aussi que l’âge aidant, nous avons trouvé une sorte d’identité qui nous est propre et que nous transmettons au vin.
Ce dernier a trouvé sa propre identité, sa verticalité avec les pieds bien ancrés dans la terre et la tête dans les étoiles.
Un vin bien avec lui-même et ressenti comme tel par ceux qui le dégustent.
C’est le principal !