Je viens de recevoir un « cahier technique » du Comité Interprofessionnel des Vins de Bordeaux, CIVB pour les initiés.
Il s’agit du premier exemplaire d’une série, sur papier glacé, consacrée au « système de management environnemental ».
Le but, somme toute louable de la démarche, est d’évaluer sa situation vis-à-vis de l’environnement et de l’améliorer.
Mais toute démarche passée à la moulinette de ces instances décalées de la réalité, devient une usine à gaz ou une succession d’actions aussi abstraites qu’inefficaces.
Contrairement à ce que le commun des mortels pourrait penser, il n’y a pas besoin d’être en bio pour respecter la nature à la sauce officielle. On peut même utiliser des désherbants chimiques, des perturbateurs endocriniens, des produits cancérigènes, mutagènes,…
Pour bien faire, il suffit d’en avoir l’intention, d’estimer la main sur le cœur « qu’on ne peut pas faire autrement » et surtout de le noter sur un cahier prévu à cet effet, ou mieux encore sur un ordinateur.
Je pourrai même ajouter qu’au CIVB, le bio on n’aime pas trop. Les raisons en sont diverses (politiques, idéologiques, refus de se remettre en cause,…)
Comme toujours, c’est l’action collective qui est privilégiée, avec des réunions, des visites,…
Après le diagnostic, c’est l’heure de la planification.
Collectivisation, planification, toute une époque… Rassurez-vous, les caves coopératives ne sont évidemment pas oubliées ; elles restent une pierre angulaire du système.
A la fin, on nous dira qu’il faut privilégier des bouteilles légères, voire même en plastique. Qu’il faut favoriser le transport ferroviaire et maritime.
Personne n’osera dire que les trains sont souvent en grève et qu’une poignée de dockers bloquent à eux seuls le commerce international d’un pays pour des exigences indécentes ou d’un autre temps.
Pour faire bon poids, bonne mesure on plantera des jachères fleuries sur le bord des parcelles à côté de la route.
On s’enorgueillira d’utiliser des hormones de synthèses à pleins bidons.
Et tout ira bien.
Grâce à l’action collective, on conserve contre le monde entier les vignes hautes et larges à Bordeaux. Pour ceux qui font du vrac dans cette viticulture de la cohésion du groupe, le tonneau de vin de 900 litres est payé 600€, quand il trouve preneur ; ce qui n’est souvent pas le cas.
Et là, maintenant on demande à ceux qui ont les chais pleins d’un vin dont personne ne veut de faire un diagnostic environnemental
pour faire face aux enjeux de demain.
Quand une Formule 1 ne fonctionne pas, on ne regarde pas en premier lieu si un autocollant publicitaire est collé en travers. On s’intéresse d’abord au moteur, au châssis et aux parties vitales.
Mais nous, on fait dans le détail quand au même moment tout s’écroule autour de nous.
On a d’abord obligé les gens à récupérer et « gérer » les fonds de cuve de traitement dans le respect de l’environnement. Puis, voyant que l’ensemble était inapplicable, on a inventé un concept extraordinaire : le nettoyage à la parcelle. On lave son pulvérisateur dans un champ et faisant une pollution ponctuelle puis la fois suivante, on change d’endroit ; et ainsi de suite. Génial et efficace, non ?
Notre pays fonctionne aussi de la même façon, au jour le jour et au petit bonheur.
Aujourd’hui, c’est le vin de cépage car il semble que certains profitent de cette vague au niveau mondial, demain ce sera le
Chardonnay à Bordeaux.
En ce moment, c’est l’environnement qui va sauver le Titanic du naufrage.
Quand aurons-nous enfin des dirigeants qui ont une vision de l’avenir et le sens des priorités ?