Il y a quelques jours, j’ai souhaité aborder le thème de l’alimentation comme facteur de bonne (ou mauvaise) santé.
C’est un sujet éminemment important et intéressant. Aujourd’hui, j’ai souhaité relier ces idées à notre expérience personnelle.
En effet, si nous sommes devenus vignerons bio et biodynamiques, c’est justement après avoir réalisé que l’alimentation des plantes était aussi un facteur, sinon LE facteur de leur bonne santé.
Tout a commencé il y a 10-15 ans lorsqu’un technico-commercial en engrais a donné à Jean-Michel un petit texte mal photocopié et datant du début des années 80.
En faisant ce geste, ce pauvre Monsieur allait se donner le bâton pour se faire battre ou plutôt qu’il allait donner à son client les arguments pour ne plus acheter ses produits !
Le texte avait été écrit par un ancien chercheur de l’INRA de Bordeaux, qui s’appelait Francis Chaboussou.
Il y définissait une théorie qu’il avait appelé la Trophobiose dans laquelle il avançait l’idée que si les maladies et ravageurs se développaient sur les plantes c’est qu’ils y trouvaient des moyens de subsistance. Sans rentrer dans les détails techniques, on peut retenir de son propos que la composition de la plante pouvait donc « attirer » ou pas les maladies et ravageurs.
Selon lui, les oligo-éléments, notamment intervenaient dans ce processus.
Il ajoutait que les pesticides pouvaient aussi « orienter » la composition de la sève vers plus ou moins d’attirance.
Il a publié plusieurs livres dont « les plantes malades des pesticides » en 1980.
Ces travaux n’ont pas connu un grand succès parmi ces collègues et depuis, Chaboussou est injustement mort dans l’anonymat le plus complet.
Pourtant, pour Jean-Michel et moi, Chaboussou a changé notre vie. On a remis la plante au centre de nos préoccupations. On a relativisé l’intérêt des pesticides pour protéger les plantes.
Le processus était enclenché, on allait dans le sens de la suppression totale des pesticides.
Pour moi, au Champ des Treilles, c’était assez facile car le Grand Père, par avarice n’avait jamais fait la part belle aux produits de synthèse.
Pour Jean-Michel à Pontet-Canet, ce fut plus compliqué car les conditions et les contraintes n’avaient rien à voir.
De réflexion en lecture, de rencontre en observation, nous en sommes arrivés en quelques années à la biodynamie.
Quel regard portons-nous sur la période Chaboussou ? La première idée qui me vient est que nous avons quitté un monde pour entrer dans autre chose de beaucoup plus logique. Il nous a fait prendre conscience du fait que l’utilisation de pesticides n’a rien d’anodin et que leurs « effets secondaires » sont loin d’être maîtrisés.
De là est née notre aversion vis-à-vis de ces produits.
Certes, la biodynamie n’est pas la trophobiose. Mais en regardant les choses de près, on se rend compte que bien souvent, les deux principes ne disent pas des choses opposées, bien au contraire. On regarde les mêmes phénomènes sous des angles différents et on les commente avec des mots différents mais au fond, on veut dire la même chose.
Nous prenons souvent la peine d’expliquer notre cheminement depuis la découverte de Chaboussou car nos interlocuteurs, surtout s’ils sont agriculteurs « conventionnels », peuvent visualiser plus concrètement l’influence de la nutrition dans la prévention des maladies et ravageurs.
Certains trouveront ces idées farfelues, pour d’autres ce sera comme pour nous le point de départ d’une prise de conscience sans
retour vers quelque chose de plus logique et respectueux de la vie.
Enfin, on éveillera peut-être des vocations de biodynamistes chez quelque uns.
Pour eux, ce sera alors le parcours d’une vie.
C’est du moins comme cela que Jean-Michel et moi envisageons notre relation avec la viticulture ; main dans la main sur un chemin de passion sans fin et où les difficultés sont largement compensées par les relations d’amour que nous entretenons avec nos vignes.