Je dois avouer que lorsque Jean-Michel a voulu que nous ayons des ruches, je n’étais pas emballée. Je n’étais pas contre non-plus, gardant à l’esprit les pots de miel que nous pouvions espérer récolter.
On a commencé à apprendre l’apiculture mais très vite, on s’est retrouvé face une approche de l’abeille qui s’apparente à ce qu’est la viticulture conventionnelle, c'est-à-dire une série sans fin d’erreurs ou même d’actions néfastes qui ne peuvent que conduire à une fuite en avant tragique.
C’est donc presque naturellement que la vision biodynamique s’est imposée à nous. Et là, nous sommes entrés dans un monde beaucoup plus intéressant, logique et respectueux de l’abeille.
Selon la même démarche que nous avons en viticulture, il faut comprendre qui est l’abeille, pourquoi elle est là et quel est son « chemin de vie ».
Cette étape, simple mais indispensable permet de rejeter un grand nombre des pratiques en cours dans cette apiculture moderne, « conventionnelle » ou même « bio » ; cette dernière n’est qu’une version édulcorée de la précédente.
L’abeille accepte de nous laisser une partie de son travail. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il faut lui piller la totalité de son labeur ou la considérer comme un forçat à notre seul service.
C’est donc avec mesure et gratitude qu’il faut prélever la part de miel dont la perte ne la mettra pas en danger.
Elle nous confirme aussi que les jachères fleuries et autres plantations artificielles de fleurs sont encore plus stupides avec l’éclairage apicole qu’avec la casquette de vigneron. Pourtant, c’était déjà très ridicule !
La bonne santé par l’alimentation, c’est l’idée première qui nous a amenés, il y a 15 ans vers une voie différente.
Et bien, c’est toujours d’actualité avec l’abeille à qui on donne à manger tout et n’importe quoi sans souci de l’adaptation, de la saison, de la diversité,…
Un touriste qui change de continent et change brutalement d’alimentation va attraper la « tourista », c'est-à-dire une diarrhée due au changement trop rapide de régime alimentaire.
Pour l’abeille, c’est pareil. La différence, c’est qu’elle ne se plaint pas au Tour-operator mais s’affaiblit un peu plus à chaque action malvenue. Au bout du chemin, il y a des maladies qui apparaissent. On va « évidemment » les combattre avec des médicaments…qui rendront l’abeille encore plus affaiblie. Et ainsi de suite…
Ce n’est qu’une partie mineure des aberrations que doit subir ce pauvre insecte.
Alors quand on voit l’abeille promue « sentinelle de l’environnement », je ne peux pas m’empêcher de penser qu’il s’agit d’un raisonnement particulièrement pauvre et partiel. Les pesticides sont un fléau certain ; pour l’abeille et les gens. Mais les dangers qui menacent cet insecte sont bien plus larges et profonds que le « simple » pesticide.
Finalement la réalité de l’abeille et celle des gens sont-elles vraiment si différentes ???
Donc, pour nos abeilles, nous avons décidé de leur offrir ce qu’il y a de mieux. Certes, notre domaine est petit et il y a fort à
parier qu’elles iront aussi butiner à l’extérieur.
On a fait un traitement biodynamique à nos prairies. Il s’agit de plusieurs hectares prairies permanentes, les seules qui vaillent pour les abeilles et les vaches.
Quand le moment sera venu, on pulvérisera de la silice. Les plantes médicinales naturellement présentes dans les prairies feront le reste.
Nos abeilles seront fortes et en bonne santé.
On leur prépare des fleurs pleines de forces de vie. Si elles veulent nous donner du miel, il sera le bienvenu. Mais on ne prendra que ce qu’elles auront préparé pour nous ; pas plus.