Mon but n'est pas de choquer les viticulteurs en vignes hautes et larges que je prends plutôt pour des victimes mais de vous faire partager mon point de vue.
Ces vignes sont nées à une époque différente après les gelées des années 50. Les vignobles ont commencé à être restructurés d'abord en arrachant un rang sur 2 et en augmentant la hauteur de la souche sans forcément changer le palissage. La mécanisation était plus facile. Effectivement, les coûts de production ont fortement baissé et la résistance au gel était bien meilleure.
A l'époque la question de la qualité des vins était secondaire et la concurrence d'autres pays n'existait pas.
Depuis, les choses ont beaucoup évolué. Le marché du vin est devenu mondial par la production et la consommation. Le niveau de qualité requis est très haut. Les consommateurs sont plus exigeants, boivent moins et meilleur.
C'est là que les vignes larges se trouvent inadaptées.
L'interprofession a trompé les producteurs en favorisant cette viticulture.
Le niveau de concentration des vins est plus faible. Ses défenseurs attestent qu'avec un rendement moindre, elles sont capables de générer des vins concentrés.
Mais quel est l'intérêt d'une vigne "économique" à cultiver si elle ne doit produire qu'une demi-récolte.
Pour une production normale, le nombre de bourgeons nécessaire est tellement important qu'il n'y a pas la place pour tout le monde le long du fil de fer.
On a donc conseillé pendant des années les pliages en arcure en partie pour limiter l'entassement. Dans ce cas, il n'y a plus assez de feuilles pour produire des sucres.
A la lumière de ces constatations, les "techniciens" préconisent maintenant des "pliages à plat". Effectivement, il y a plus de feuilles mais toujours pas assez de place sur le fil pour recevoir tous les bourgeons donc des entassements importants. Il y a bien la possibilité d'avoir moins de bourgeons mais à ce moment là, il n'y aura pas assez de vin.
Dans un contexte de recherche de qualité, les vignes larges cherchent donc à résoudre la quadrature du cercle. C'est pour tout cela que je ne les aime pas.
Ces vignes n'ont pas été prévues pour le travail du sol mais pour l'usage du désherbant chimique.
La tendance actuelle de retour aux labours n'est pas aussi facile dans ces vignes dont les rangs très éloignés les uns des autres rendent ce travail fastidieux.
Enfin, les ceps de ces vignes larges ne vieillissent pas car les vigueurs sont importantes et génèrent donc des maladies.
Progressivement, elles devraient disparaitre du paysage viticole bordelais. Beaucoup de viticulteurs replantent maintenant avec des densités plus importantes.
J'ai cependant toujours un pincement au cœur en pensant à toutes ces parcelles sacrifiées il y a quelques décennies sur l'autel du modernisme et qui après un passage par les vignes larges se retrouvent à nouveau avec des rangs plus étroits. Leurs jeunes ceps nécessiteront plusieurs décennies pour produire de nouveau des vrais vins concentrés. Quelle perte de temps et de capital viticole.
Vous ne pensez pas qu'il y a du gâchis dans l'air et qu'il ne faudrait pas toujours suivre les conseils des conseillers!